Auto-entrepreneur pour deux ans
Dès le mois de juillet 2013, un texte sera présenté à l’Assemblée Nationale pour réformer le statut d’auto-entrepreneur. Cette réforme aura un impact direct sur l’AERL d’une part, et incitera certainement à la transformation prochaine d’auto-entreprises en EIRL notamment.
Évolutions souhaitées par le gouvernement
Sylvia Pinel, ministre de l’artisanat et du commerce, gère cette réforme de l’auto-entreprise depuis plusieurs mois, comme l’avait promis l’actuel président de la république durant sa campagne. François Hollande avait en effet souligné la concurrence déloyale que subissent les entreprises du fait de la création du statut d’auto-entrepreneur par le précédent gouvernement, et s’était engagé à réformer ce statut fiscal simplifié.
Déjà, à l’époque, ces propos avaient été fortement contestés : les auto-entreprises ne sont-elles pas de véritables entreprises ? Les cotisations des auto-entrepreneurs sont-elles réellement inférieures à celles des autres entrepreneurs ? Sans oublier que la non-imposition des auto-entrepreneurs à la TVA résulte non pas de leur statut mais du régime de la franchise de base applicable à toute entreprise.
Aujourd’hui, ce sont ajoutés aux critiques :
– Un rapport de l’IGS et l’IGAS pourtant commandé par le gouvernement : ce rapport démontre que le statut d’auto-entrepreneur ne concurrence pas les entreprises mais limite le travail au noir, et préconise donc de ne pas le limiter dans le temps.
– Les avis des organisations professionnelles qui représentent les 900.000 auto-entreprises en fonctionnement à ce jour.
Mais rien n’y fait, malgré la volonté de dialogue affichée par le ministre, une promesse est une promesse et celle-ci (en compensation de bien d’autres ?) sera tenue. Aussi, Sylvia Pinel propose l’évolution de l’auto-entreprise en obligeant les entrepreneurs individuels concernés à changer de statut.
Les évolutions de l’auto-entreprise
La contrainte principale qui sera proposée au vote des députés : la durée d’une auto-entreprise. Celle-ci sera limitée :
– pour une activité principale : à deux ans ; passé ce délai, l’auto-entrepreneur devra ou bien changer de statut ou bien cesser son activité.
– pour une activité secondaire dont le chiffre d’affaires dépasserait un plafond encore à définir (le chiffre de 15.000 euros a été cité), la limite de deux ans ne s’appliquerait peut-être pas, mais de nouvelles obligations en matière d’assurance et de formation seraient imposées.
– pour une activité secondaire au chiffre d’affaires limité, pas de changement attendu.
Aussi, les auto-entrepreneurs afficheraient de plus en plus de profils différents :
– exercice d’une activité principale ou secondaire (et comment prendre en compte tous les cas de cumul temporaire d’activités ?),
– limite de chiffre d’affaires applicable pour déterminer la durée maximum de l’auto-entreprise (avec tous les cas de dépassement de ce seuil durant une année seulement...) puis plafond de chiffre d’affaires imposant un changement obligatoire de statut (34.000 euros actuellement pour les services et BNC),
– pour les fonctionnaires, autre limite de deux ans (+ 1 an sur demande) pour l’exercice d’une activité exercée avec autorisation hiérarchique,
– et comment sera gérée l’ACCRE, l’ARCE, le maintien des ARE (voir notre rubrique "Aides création") en cas de changement de statut ?
Pourquoi réformer ce qui marche ?
Près d’un million d’auto-entreprises en France, pourquoi modifier ce statut qui a aussi largement séduit les entrepreneurs ?
Les attentes de cette réforme sont double :
– limiter la concurrence exercée par les auto-entrepreneurs sur les artisans,
– pérenniser les auto-entreprises créées, les inciter à croitre et à développer l’emploi.
Concernant cette concurrence déloyale imputée aux auto-entrepreneurs, il faut noter que le rapport de l’IGS-IGAS ne confirme pas cette affirmation. Bien au contraire, il indique que ce statut simplifié limite le travail au noir, principal source de distorsion des règles économiques.
D’autre part, la hausse de 16% des cotisations des auto-entrepreneurs en 2013 a totalement supprimé l’avantage dont pouvaient profiter certains d’entre eux. On peut même affirmer que ce taux de prélèvement est pénalisant pour les auto-entrepreneurs qui ne maitrisent pas correctement leurs coûts et supportent en réalité des charges réelles supérieures à celles estimées (pour les artisans auto-entrepreneurs qui ne prennent pas en compte par exemple le coût de leur matériel, de leur véhicule... lors de l’établissement de leurs devis).
Enfin, en matière de TVA, il faut relire notre article sur l’imposition des EIRL à la TVA : ce n’est pas le statut juridique qui implique l’imposition ou non à la TVA, mais le montant du chiffre d’affaires de l’entreprise. Un auto-entrepreneur qui cumule des ventes de 30.000 euros et à qui on impose un changement de statut juridique restera, sur option, soumis au régime de la franchise en base de TVA qui lui permet de ne pas facturer de TVA à ses clients.
Maintenant, peut-on obliger les auto-entrepreneurs à développer leur activité jusqu’à recruter des salariés ?
D’une part, il faut avouer que tous les auto-entrepreneurs n’ont pas les compétences pour devenir employeur. Cela exige en effet notamment des qualités de gestion et de management qui sont très éloignées des préoccupations de nombre d’auto-entrepreneurs dont le seul objectif est de créer leur propre emploi devant leur impossibilité à réintégrer le marché de l’emploi salarié.
D’autre part, comment imaginer qu’une auto-entreprise qui dégage souvent moins de 2.000 euros par mois de chiffre d’affaires, permettant au maximum une rémunération au SMIC de son entrepreneur, puisse être viable si l’on complexifie son fonctionnement. Car ce n’est pas le niveau des prélèvements obligatoires qui deviendra du jour au lendemain ingérable pour cet entrepreneur, mais le mode de calcul de ses cotisations (appels puis régularisations) et ses nouvelles obligations déclaratives (déclarations de cotisations maladie, retraite, déclarations d’impôt...).
Ce sont ces barrières à l’entrée de la création d’entreprise que contournait le statut d’auto-entrepreneur, pour éviter justement que la plupart des nouvelles entreprises cessent leur activité dans les deux premières années de leur création, or ce sont ces barrières que l’on souhaite réinstaurer, au moment même où le chômage s’affiche à des taux désespérant !
L’avenir des auto-entrepreneurs
Que vont bien pouvoir faire les auto-entrepreneurs après deux ans d’activité ?
En l’absence de démarches particulières, ils deviendront logiquement entrepreneurs individuels soumis au régime du réel normal ou réel simplifié (déjà les choses se compliquent, sans parler du micro-réel...).
Sur option, ils pourront ainsi créer une EIRL et protéger leur patrimoine, mais cela n’est pas une nouveauté puisque l’AERL existe depuis quelques années déjà...
Cette limitation de leur statut à deux ans peut également être l’occasion pour un auto-entrepreneur de créer une entreprise unipersonnelle, avec le choix entre l’EURL et la SASU.
D’une façon générale, toutes ces possibilités permettront à l’entrepreneur d’opter pour l’impôt sur les sociétés.
Mais comment développer ces sujets ? Comment expliquer rapidement :
– Les critères de choix entre le statut d’assimilé salarié (gérant minoritaire de société, président de SASU) et de travailleur non salarié (entrepreneur individuel, EIRL soumise à l’impôt sur le revenu, gérant majoritaire d’EURL ou SARL).
– L’intérêt, de plus en plus limité d’ailleurs, d’une option pour l’impôt sur les sociétés.
– Les différences de fonctionnement entre une entreprise individuelle et une société.
– Les différents moyens de protéger son patrimoine personnel (société ou EIRL, déclaration d’insaisissabilité).
Ce site répond à ces questions, des formations seront certainement prévues pour accompagner les auto-entrepreneurs dans leur changement de statut, mais s’intéresser à ce sujet demande du temps et de l’énergie, or comment croire que c’est par la loi et la contrainte que tous les auto-entrepreneurs parviendront à réussir cette mutation ?
Je ne vois que des inconvénients à cette réforme, aussi vous pouvez publier vos commentaires ci-dessous, notamment sur le thème de la concurrence subie par les artisans du fait de la multiplication du nombre d’auto-entrepreneurs, à l’origine de cette loi qui sera débattue prochainement à l’Assemblée.
Les contraintes sur les auto-entrepreneurs vont être multipliées dans le but de les obliger à perdre ce statut simplifié et à créer de réelles entreprises. C’est un peu la logique du gouvernement qui, malgré les avis et conseils, souhaite limiter le nombre d’auto-entrepreneurs en réduisant notamment la durée maximale de vie d’une auto-entreprise.
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Messages
1. Auto-entrepreneur pour deux ans, 30 mai 2013, 11:39, par bertrand08
Bonjour a tous , j’ai crée une entreprise de Mutli Services en second œuvre du bâtiment en 2009 , et comme toute entreprise j’ai connu des hauts et des bas dans mon carnet de commande mais j’arrivais tous les ans au plafond de 32000€ me dégageant un salaire a peu prés décent et faire vivre ma famille . le statut d’autoentrepreneur était pour moi une sécurité
de retour a mon emploi premier ( tourneur ) lors de ces périodes creuses car c’est le seul statut qui vous permet de devenir salarié (en intérim ou CDD) et en même temps être indépendant . or patatras , changement de gouvernement donc changement des règles du jeu. Pour moi le jeu va être simple a présent, fermeture de la société ( qui marche toujours bien dommage ! ) et intérim pendant 6 mois , et direction Assedic , comme nos dirigent n’aiment que les assistés, alors autant être un assisté.je ne comprend pas ces dirigeants qui prennent la décision de casser un des seul truc qui permet de leurs faire rentré du cash et du même temps ne l’oublions pas de sortir les autoentrepreneurs des stats du chômage et oui si tous les AE fond comme moi il y auras 900000 chômeurs de plus.
1. Cumul avec un contrat de travail, 30 mai 2013, 14:43, par EIRL
le staut d’auto-entrepreneur "est le seul statut qui vous permet de devenir salarié (en intérim ou CDD) et en même temps être indépendant" : non, vous pouvez parfaitement cumuler un contrat de travail avec :
– un autre contrat de travail : donc avec des fonctions de gérant minoritaire d’une SARL par exemple, président d’une SASU, des missions de portage salarial.
– le statut de travailleur non salarié, dont relève l’entrepreneur individuel et le gérant majoritaire de société.
Votre activité pourra donc être poursuivie, simplement elle sera complexifiée.