Procédure collective EIRL en difficulté

L’ordonnance du 10 décembre 2010 permet l’entrée en vigueur de la loi sur l’EIRL du 15 juin 2010. Cette ordonnance adapte également le droit des procédures collectives et du surendettement des particuliers à l’EIRL.

Cessation des paiements d’une EIRL

Une EIRL est en cessation des paiements, communément dénommée dépôt de bilan, lorsque son actif disponible est insuffisant au regard de son passif exigible (dettes fournisseurs, salaires, cotisations sociales, TVA...).

Pour une EIRL, l’actif disponible est le patrimoine affecté. Ce patrimoine est connu par ses créanciers grâce à la déclaration d’affectation initiale et son actualisation annuelle par le dépôt au même registre des comptes de l’EIRL. Mais, depuis le dernier dépôt des comptes annuels, la valeur de ce patrimoine d’affectation aura pu changer. De plus, se pose toujours le problème de l’évaluation des biens affectés car l’entrepreneur a pu initialement sur-évaluer un bien, engageant de ce fait sa responsabilité et son patrimoine privé, mais empêchant de mesurer la cessation des paiements.

Mais surtout, l’ordonnance indique dans son article 3 5° que le patrimoine de l’EIRL en cessation des paiements peut comprendre "les biens détenus dans le cadre de l’activité à raison de laquelle la procédure a été ouverte (et) qui sont compris dans un autre de ses patrimoines". Cette précision est particulièrement inquiétante lorsque l’entrepreneur possède plusieurs activités (cumul d’une EI avec une EIRL, ou gestion de plusieurs EIRL) car le patrimoine lié à l’activité en difficulté n’est plus alors seulement le patrimoine affecté. En effet, un entrepreneur a le choix d’affecter ou non un bien utilisé dans le cadre de son activité mais non indispensable à son activité (son véhicule par exemple). Aussi, si ce bien est utilisé par l’entrepreneur dans le cadre de ses différentes activités, le cloisonnement entre patrimoines affectés perd soudain de sa force.

D’une façon générale, l’état de cessation des paiements d’une EIRL risque d’entraîner des confusions et conflits et la jurisprudence permettra bientôt de mieux mesurer l’efficacité du cloisonnement à l’EIRL en difficulté de la procédure collective mise en place.

Les procédures collectives pour une EIRL

Lorsqu’une EIRL est en situation de cessation des paiements, l’entrepreneur doit se présenter au Greffe du Tribunal de Commerce (ou au Tribunal de Grande Instance) du siège de l’EIRL pour y effectuer une déclaration de cessation des paiements.

Une EIRL en cessation de paiements, comme toute autre entreprise, peut alors relever de l’une des quatre procédures suivantes :
 La procédure de conciliation est réservée aux EIRL qui connaissent des difficultés mais sans être encore en état de cessation des paiements. La conciliation recherche entre l’entrepreneur et ses créanciers un accord qui évitera cette cessation des paiements.
 La procédure de sauvegarde entraîne la rédaction d’un plan de sauvegarde arrêté par jugement à l’issue d’une période d’observation. L’entrepreneur continue alors de diriger son entreprise mais peut être assisté par un administrateur judiciaire tandis qu’un mandataire judiciaire représente l’ensemble des créanciers de l’entreprise.
 Le redressement judiciaire est ouvert à la demande de tout créancier de l’entreprise en cessation des paiements.
 La liquidation judiciaire est prévue lorsque le redressement judiciaire de l’entreprise n’est pas envisageable. Le tribunal saisi par tout créancier de l’entreprise dans les 45 jours suivant la cessation des paiements désigne alors un liquidateur qui va, d’une part, vérifier les créances de l’entreprise et, d’autre part, liquider les actifs de l’entreprise.

Protection patrimoine EIRL et procédure collective

Lors de la liquidation d’une entreprise individuelle (EI), l’ensemble du patrimoine de l’entrepreneur individuel est pris en compte pour désintéresser ses créanciers professionnels.

A l’inverse, la liquidation d’une société gérée par un entrepreneur n’a aucun effet sur les autres sociétés éventuelles gérées par ce même entrepreneur.

Suivant l’objectif de rapprocher l’EIRL de l’EURL, la protection du patrimoine apportée à un entrepreneur par l’EIRL produit également ses effets lors de l’ouverture d’une procédure collective. Dans ce cas, cette procédure ne concerne alors que le patrimoine affecté à l’EIRL, à l’exclusion du patrimoine privé de l’entrepreneur (entreprise individuelle éventuelle comprise) ou du patrimoine affecté à une autre EIRL de cet entrepreneur. Rappelons en effet qu’à partir de 2013 un même entrepreneur pourra posséder plusieurs EIRL. Aussi, une procédure collective concernant l’un de ces patrimoines affectés ne concernera aucunement les autres patrimoines de l’entrepreneur.

Il faut cependant rappeler les limites à cette protection du patrimoine découlant de la création d’une EIRL :
 L’EIRL n’est pas opposable aux créanciers dont les droits sont nés antérieurement au dépôt de la déclaration d’affectation (théoriquement, l’EIRL peut être opposable à tous les créanciers, mais l’accord des créanciers doit alors être obtenu, or quel intérêt aurait un créancier d’accepter ce risque supplémentaire ?).
 La responsabilité de l’entrepreneur est engagé lors de l’évaluation des biens affectés à son EIRL, notamment lors de l’évaluation de biens d’une valeur supérieure à 30.000 euros.
 En cas de dissimulation d’un bien affecté à l’activité en difficulté, ou lorsque l’entrepreneur affecte un bien utilisé dans le cadre de l’activité en difficulté à un autre patrimoine affecté, la responsabilité de l’entrepreneur peut être élargie.

EIRL et déchéance du terme des dettes non affectées

Dans le cas de la liquidation judiciaire d’une entreprise individuelle (EI), cette procédure entraîne la déchéance du terme des dettes privées de l’entrepreneur. La liquidation s’étend à l’ensemble du patrimoine de l’entrepreneur et l’ensemble de ses dettes, professionnelles et privées, deviennent immédiatement exigibles. Par exemple, si cet entrepreneur possède un bien immobilier constituant un investissement locatif et pour lequel un emprunt a été souscrit, la liquidation judiciaire de son EI conduit au remboursement du capital restant dû de cet emprunt et donc à la cession du bien.

NB : Pour limiter le risque lié à la création d’une entreprise individuelle, l’entrepreneur individuel avait déjà la possibilité de mettre à l’écart de son activité professionnelle ses biens immobiliers en faisant établir par un notaire une déclaration d’insaisissabilité.

De la même façon, l’entrepreneur individuel surendetté qui ne parvient plus à rembourser ses dettes privées et qui souhaite bénéficier d’un plan de redressement doit préalablement liquider son EI. Pour trouver une solution à sa situation personnelle de surendettement, l’entrepreneur individuel doit supprimer sa principale source de revenus professionnels !

La séparation des patrimoines de l’entrepreneur apportée par l’EIRL produit là encore ses effets : la liquidation judiciaire d’une EIRL se cantonnant au patrimoine affecté à cette EIRL n’entraîne nullement la déchéance du terme des dettes non affectées (dettes privées, dettes de l’entreprise individuelle gérée par le même entrepreneur, dettes des autres EIRL gérées par ce même entrepreneur).

Cette particularité est un véritable avantage pour les entrepreneurs qui souhaitent développer une activité secondaire. En effet, dans le cas d’une activité principale, la liquidation de l’entreprise individuelle entraîne l’absence de revenus de l’entrepreneur et donc une situation personnelle difficile. En revanche, l’entrepreneur qui bénéficie déjà de revenus d’activité et qui crée une activité secondaire refuse que cette activité complémentaire puisse mettre en péril son patrimoine privé. Or le statut d’auto-entrepreneur (AE) a notamment été créé pour répondre à ces cas de salariés, de retraités, qui souhaitent investir leur temps libre dans la création d’une entreprise. De ce point de vue, l’AERL (auto-entreprise à responsabilité limitée) peut être vue comme un prolongement du statut d’AE et une réponse à la promesse d’Hervé Novelli lors du lancement de ce statut de permettre de limiter le risque pris par ces nouveaux entrepreneurs.

Une procédure de prévention des difficultés ou une procédure collective peut permettre à une EIRL qui connaît des difficultés financières d’éviter une liquidation.

Messages

  • Bonjour,
    Voici mon parcours : 01/10/2011 reprise d’une activité en EI. 31/12/2011 pré-bilan avec une perte de 12330€. Gros problèmes avec véhicule spécial et baisse de chiffre d’affaires. Je décide pour continuer de passer en EIRL. L’expert comptable et le notaire n’y connaissaient pas grand chose. Immatriculation enfin le 24 avril auprès de la CCI et de la CMA de Dijon. Depuis le début je n’ai pas de salaire et remets chaque mois de l’argent et donc je n’ai pas de dettes. Je décide fin juin de me mettre en cessation de paiements. Le 3/07/12 le tribunal de Dijon me mets en liquidation judiciaire simplifiée. Début septembre, une vente aux enchères à eu lieue. Je ne connais pas le montant. La déclaration d’affectation de patrimoine était de 18000€. Si le montant de la vente n’a pas atteint cette somme, il ne doit pas manquer grand chose,je peux compléter avec l’aide de ma famille. La semaine dernière, le liquidateur me demande par courrier des renseignements sur mon véhicule personnel pour le vendre aux enchères ainsi que les actes de propriété de mes biens immobiliers.
    A mon humble avis, il ne respecte pas le fait que je sois en EIRL....
    Pouvez-vous me renseigner. Merci d’avance. Pat

  • bonjour,

    j’ai crée en 2011 une EIRL pour un évènement que j’organisais. celui ci n’a pas marché, et il y a une procédure de liquidation judiciaire simplifiée. lors de l’évènement suite à des incidents, des chèques ont été demandés alors que les fonds n’étaient pas sur le compte (professionnel EIRL). la liquidation s’est conclue normalement, aucune faute n’a été reconnue contre moi alors que j’ai demandé 2 fois au procureur d’ouvrir une enquête pour faire la vérité sur les agissements lors de cet évènement. au final, l’interdiction bancaire que j’ai eu a cause de cette EIRL, a rejailli sur mon compte personnel. pourtant il s’agit bien de 2 comptes distincts avec l’inscription pour les chèques impayés qu’il s’agit de ceux de l’EIRL.

    ma question est donc de savoir s’il est normal que cette situation affecte mon compte bancaire personnelle ? et si cela n’est pas normal, quelle est la démarche (la banque de france ?), et quel est le texte de lois ?

    merci

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